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Xelias
1 janvier 2009

L'art et la religion

17emeComme souvent beaucoup d'art religieux dans la dernière livraison de FMR, mais il y a des sortes d'art religieux qui m'ennuient un peu, comme ceci : (Francesco de Mura, 1696-1782).
C'est joli, c'est enlevé, c'est virtuose, mais bon, c'est plus décoratif qu'autre chose, non ? Même lorsque ça a la rigueur d'un tableau de Poussin, les Assomptions et autres Apothéoses me laissent souvent de marbre. j'ai dû mal à y voir autre chose qu'un étalage de peinture et d'iconographie sans véritable sentiment religieux.

Il est en revanche un art religieux beaucoup plus fort et pénétrant, un art plus primitif (par primitif, je veux dire : qui n'a pas conscience d'être de l'art) et on peut en trouver trois exemples dans le même numéro de FMR.

romain1Chronologiquement, on peut commencer par l'art romain avec de très belles "pinakes" de Locri, sortes d'ex-voto que les jeunes filles, futures mariées, offraient au sanctuaire de Perséphone, déesse de la fertilité. C'est d'une beauté calme, souveraine. Beaucoup de ces ex-voto illustrent l'enlèvement de Perséphone par Hadès, le dieu des enfers : cet énévement qui à l'origine des saisons selon la mythologie, mais c'est aussi une sorte de métaphore du mariage où le marié enlève la jeune fille à ses parents et à sa famille. Derrière la tranquilité apparente de ces petits bas-relief se cache ainsi un fort sens du sacré et une inquiétude à plusieurs niveaux de lecture : la peur de mauvaises récoltes se mêle à l'anxiété de la jeune fille devant les noces et la sexualité.
Avec le christianisme et les invasions dites barbares survient un art tout à fait nouveau où les influences antiques sont encore très fortes mais la maîtrise des canons a disparu, tandis que l'iconographie et la mystique chrétiennes viennent tordre encore un peu plus les belles formes antiques.
mosaique1Très romain encore que ce pavement de la cathédrale d'Otrante datant du XIIè siècle. Le dessin est plus qu'hésitant, pour ne pas dire plus, mais cela n'empêche nullement une iconographie inventive et une prolifération de bestiaires et de scenettes, comme cette Eve où le serpent provient de l'extérieur de sa "bulle".mosaique2

Et pour finir, quelque chose d'assez extraordinaire : les illustrations de "l'Apocalypse de Beatus de Liébana", du VIIIè siècle, qui a droit à une page assez importante sur Wikipedia (non , je ne crache pas sur Wikipedia, c'est bien utile parfois pour des recherches rapides..., voir ici). Il faudrait replacer ces oeuvres dans le contexte de l'art mozarabe, de la présence musulmane en espagne, etc. Il faudrait aussi citer chaque extrait de l'apocalypse correspondant à chaque image pour en sentir au mieux toute la force, mais je me contenterais de copier-coller cette critique écrite par un certain Jacques Fontaine en 1977 : 

bible1"Déjà ces peintres du xe siècle avaient pratiqué une technique des glacis bien avant Gauguin, précédé Matisse dans les contre-courbes fluides de leurs contours, inventé l’expressivité réaliste du Picasso des Demoiselles d’Avignon. Et de fait, il n’est pas (…) jusqu’à l’art des portraits cubistes où le visage est à la fois vu de face et de profil, jusqu’à la démesure animalière du maître de Guernica, qui ne trouvent des brillants précédents chez ces miniaturistes en avance sur leur millénaire."

Ou encore, à propos de la couleur : Une des originalités de bien des pages des Beatus, est la présentation des scènes sur un fond de larges bandesbible2 peintes, horizontales, qui ne correspondent à aucune réalité extérieure. Il ne s'agit pas du ciel, de l'eau, de l'horizon ou encore d'effets de rapprochement ou d'éloignement. On a parlé à juste titre d'une « déréalisation » de l'espace par la couleur.
« Comme plus tard chez le Greco, la peinture s'avère ici méthode spirituelle », écrit Jacques Fontaine.

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Commentaires
R
très belles oeuvres mais, parfois un peu trop farfelues
Xelias
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