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Xelias
28 octobre 2009

Credo

Greco

J'ai parfois entendu dire autour de moi :
"Je ne suis pas chrétien mais bon, de là à dire que je ne suis pas athée... Il existe sûrement quelque chose, on ne peut pas affirmer qu'il n'existe rien. Il y a des signes, parfois, comme des traces, dans le monde extérieur ou dans notre propre conscience Un saisissement qui peut nous prendre, une énergie qui nous traverse, une présence quelque part, au-delà, avant nous ou après nous..." Le carcan chrétien, souvent catholique plus que protestant, est trop lourd à porter : contraignant, arbitraire, absurde, alambiqué, entaché de trop de crimes du passé et du présent. Mais la foi, ou une foi, quelle qu'elle soit, subsiste, mêlée parfois de notions venues d'ailleurs, d'Asie.

Moi non. J'affirme mon athéisme.
Dieu n'existe pas.

L'idée même de Dieu m'est venue de l'extérieur, de livres ou de personne que je n'ai aucune raison de croire plus que ma propre conscience. Mon Livre à moi, c'est l'éthique de Spinoza, un livre ou Dieu n'est rien d'autre (à mes yeux) que la nature, que ce qui existe et ce qui pousse à exister.

Mas mon athéisme est un drôle d'athéisme. Un athéisme qui ne m'a pas empêché de lire les Evangiles, de lire sur le judaïsme, sur le christianisme. C'est un athéisme qui s'est construit contre (et donc avec) le catholicisme, contre (et donc avec) la théologie. Après tout, leplus grand film chrétien, l'evangile selon St Matthieu, de Pasolini, n'a-t-il pas été réalisé par un athée marxiste ? Et les ouvrages de Kazantzaki (La Dernière Tentation, la Lettre au Greco) ne sont-ils pas des oeuvres qui ne cessent de question la religion, non en la rejetant simplement, mais en l'intégrant, en la dépassant ?
Mon athéisme est un athéisme tranquille et serein, à la Spinoza, mais traversé par le constat nietzschéen que la mort de Dieu est une perte - vivre sans Dieu ne va pas de soi. Quitte à la critiquer, à la démolir, encore faut-il considérer la religion comme un adversaire (et plus fort est ton adversaire, moins tu le méprises, plus ta lutte te grandira.)

A l'inverse de ceux qui rejette la religion pour ne garder que la foi, je préfère jeter le bébé et garder l'eau du bain. Que nous importe après tout l'existence ou la non-existence de Dieu ? des miracles ? de la vie après la mort ? Mais la théologie, les dogmes, les paraboles : c'est là le coeur du problème, ce qui est véritablement fascinant.

Longtemps, j'ai usé de la métaphore amoureuse, comme dans l'amour courtois où la relation à la femme aimée, idéalisée, inaccessible, devenait équivalente à la relation à un Dieu aimé, idéalisé, inaccessible et muet. Et cela a donné un petit film : "l'Amant, la Muse et le Satyre". Puis j'ai renoncé aux femmes et à l'amour idéal. La relation à Dieu le Père est aussi l'équivalent à la relation au Père (réel ou abstrait) - ce Père contre lequel il faut bien se dresser un jour ou l'autre. Accepter ou rejeter son code moral, sa vision du monde - en tout cas, faire ce qu'on peut...

Dire : "Je suis athée.", c'est dire :" Je n'ai pas de père."
Et cela ne va plus du tout de soi. Et les réponses de la religion - aussi fausses, aussi absurdes et tordues soient-elles - m'aident parfois à trouver la bonne direction à prendre (il suffit parfois de prendre le chemin inverse à celui qu'elles indiquent !).

Je suis un athée militant et désemparé.

(iconographie : "La Vision de Saint Jean", Le Greco, détail)

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Xelias
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