avoir des amis hétéro : est-ce possible ? Est-ce souhaitable ? (2/4)

À mon arrivée au bar associatif de l’Epine, perdu en plein dans le Neudorf résidentiel, j’eus l’occasion d’assister à cette scène incroyable d’une jeune transsexuelle en cours de transformation demandant des conseils pour se prostituer au mieux. J’étais suffisamment gêné d’entendre toute la conversation, je ne pouvais évidemment pas l’enregistrer mais ça aurait valu le coup ! La jeune femme, complètement naïve, se voyait escort girl pour un « gérant » suisse qui l’avait contactée par Internet en la rassurant sur le caractère légal et réglementé de la prostitution en Suisse, ou sinon pute faisant la tournée des bordels en France ou en Allemagne (sans parler allemand) ou je ne sais quoi encore, tout cela pour payer sa transformation complète sans avoir à passer par la case « je travaille 35h par semaine dans un boulot de merde pour un salaire de merde ».

Et je dois dire que ceux à qui elle s’était adressée ont très bien répondu. Outre les exhortations un peu convenues à ne pas se soumettre à l’exploitation capitaliste de son corps, il y eut deux réponses plutôt justes. La première : « Tu veux compléter ta transformation pour te construire une identité, ton identité, et le moyen que tu envisages pour y arriver, c’est de louer ton corps pour un métier avilissant. Tu dis que ça ne te touche pas de coucher avec des mecs que tu n’aimes pas, que ça t’est indifférent, mais si ce que fait ton corps t’est indifférent, pourquoi ta transformation ? Cest détruire d’un côté ce que tu essaies de construire de l’autre. Tu penses que ça peut ne durer que quelques mois mais demande à Nina, une pute du boulevard Untel, et elle t’en racontera des histoires d’autres putes qui pensaient que c’était provisoire. » Et le deuxième argument, encore plus prosaïque : « Tu dis vouloir faire la pute pour ne pas avoir à travailler et te simplifier la vie, mais tu en es déjà à échafauder des plans sur la comète sur la manière d’échapper à ton futur maquereau s’il abuse de toi, ou de faire la tournée de bordels que tu ne connais pas dans des pays dont tu ne parles pas la langue ! Es-tu sûre que tu te simplifies vraiment la vie ? »

Mais la fille était vraiment naïve, elle avait bu toutes les paroles du proxenète suisse, elle s’imaginait une vie de pute de luxe telle qu’on peut la voir parfois au cinéma et elle arborait un élégant collant résille.

Puis la soirée commença enfin.